29 septembre 2024

L’intelligence artificielle dans la gravure : l’avis de Nicolas Salagnac

Nicolas Salagnac, Meilleur Ouvrier de France en gravure médaille et enseignant au lycée Ferdinand Fillaud dans le Jura, partage ses réflexions sur l’utilisation de l’intelligence artificielle dans la gravure. Bien que Salagnac ne l’utilise pas encore pleinement dans son métier de graveur, il reconnaît son potentiel dans le domaine de la conception graphique. Il nous explique les limites techniques actuelles et l’importance de maintenir une maîtrise manuelle du métier.

L’intelligence artificielle peut-elle vraiment remplacer l’expertise manuelle dans la gravure ?

Non, l’intelligence artificielle dans la gravure ne remplace pas l’expertise manuelle, mais elle pourrait venir en complément. Salagnac souligne que son métier nécessite une précision particulière, notamment pour la création de bas-reliefs, une technique qui exige une approche manuelle complexe.

Actuellement, les logiciels d’IA ne sont pas encore capables de reproduire ce niveau de détail et de spécificité. Par exemple, la création d’un bas-relief ne consiste pas simplement à « aplatir » un modèle 3D, mais à sculpter des formes nuancées qui respectent la perspective et la profondeur. Pour cela, les outils d’IA disponibles ne sont pas encore adaptés.

Quels outils d’intelligence artificielle sont utiles pour les graveurs ?

Même si Nicolas Salagnac n’utilise pas directement l’intelligence artificielle dans la gravure, il est ouvert à l’expérimentation avec des outils numériques connexes. Par exemple, la modélisation 3D est déjà une partie intégrante de son processus de travail. L’IA pourrait éventuellement servir à optimiser certaines étapes de création.

1. Modélisation 3D et IA pour les préparations de médailles

La numérisation 3D permet de créer des modèles de médailles, réduisant ainsi le besoin de moulage traditionnel. Cela facilite la reproduction d’un modèle dans différents formats sans perdre en qualité, ce qui représente un gain de temps. Cependant, pour l’heure, aucune IA ne peut remplacer la main du graveur lorsqu’il s’agit de terminer la sculpture à l’envers sur la matrice d’acier.

2. Amélioration de la conception graphique grâce à l’IA

Les logiciels de conception graphique basés sur l’IA peuvent être utilisés pour accélérer certaines tâches en amont, comme la mise en page d’une médaille ou la réalisation d’un modèle 3D de base. Cependant, la touche finale reste le domaine exclusif du graveur. Salagnac explique que les ajustements manuels sont nécessaires pour atteindre le niveau de perfection exigé dans son métier.

Quelles sont les limites de l’intelligence artificielle dans la gravure ?

L’intelligence artificielle dans la gravure présente encore des limites importantes. Selon Salagnac, bien que certaines tâches numériques puissent être automatisées, l’aspect manuel et la créativité personnelle restent essentiels. Il distingue plusieurs limites technologiques et artistiques.

1. Limites technologiques de l’IA

L’IA actuelle n’est pas conçue pour les techniques complexes comme le bas-relief. La gravure manuelle requiert une compréhension subtile des proportions et des textures, ce que l’IA ne maîtrise pas encore. De plus, les logiciels nécessitent encore beaucoup d’améliorations pour pouvoir assister les graveurs dans des tâches aussi spécifiques.

2. Limites créatives et culturelles

Salagnac insiste sur le fait que la culture et le savoir-faire artisanal ne peuvent pas être remplacés par l’IA. Seule l’expérience acquise par la pratique manuelle permet de créer des œuvres uniques. Visiter des musées, étudier les œuvres d’art et cultiver sa propre créativité sont des éléments indispensables pour rester maître de son art.

Quels sont les dangers de l’intelligence artificielle dans la gravure ?

L’intelligence artificielle dans la gravure présente des dangers lorsqu’elle est utilisée de manière mal intentionnée ou sans discernement. Nicolas Salagnac évoque plusieurs risques pour le métier de graveur et pour les métiers d’art en général.

1. Risque de perte d’authenticité et de propriété intellectuelle

L’IA peut, à travers des procédés de copier-coller, répliquer des œuvres sans respecter les droits d’auteur. Ce phénomène menace la propriété intellectuelle des graveurs et autres artisans. Pour Salagnac, il est essentiel de protéger le travail créatif des artistes face à cette nouvelle technologie, tout en veillant à ce que l’IA ne devienne pas un simple outil de duplication d’œuvres existantes.

2. Remplacement des compétences manuelles

Bien que l’IA puisse alléger certaines tâches, Salagnac met en garde contre l’idée de remplacer totalement les compétences manuelles par des processus automatisés. Il insiste sur l’importance de conserver une maîtrise complète des techniques artisanales pour garantir la qualité et l’originalité des créations.

Pourquoi l’intelligence artificielle reste une opportunité pour les artisans ?

Bien que Nicolas Salagnac soit prudent quant à l’utilisation de l’IA, il reconnaît qu’elle peut être une opportunité pour les artisans. Il encourage ses confrères à rester ouverts à l’innovation et à tester de nouveaux outils.

1. L’IA comme support à la création

Nicolas souligne que l’IA, bien utilisée, peut compléter le travail des artisans en simplifiant certaines étapes techniques ou répétitives. Cela permet de se concentrer sur la partie la plus créative et sur l’innovation artistique.

2. L’importance de la formation et de l’expérimentation

Il est crucial que les artisans se forment aux nouvelles technologies tout en conservant leurs savoir-faire traditionnels. L’IA ne doit pas remplacer l’artisan, mais servir d’outil complémentaire pour l’aider à se moderniser sans perdre en qualité.

Conclusion : L’intelligence artificielle dans la gravure, entre limites et opportunités

En conclusion, l’intelligence artificielle dans la gravure n’est pas encore suffisamment développée pour remplacer les compétences manuelles des graveurs. Toutefois, elle offre des opportunités intéressantes pour alléger certaines tâches et améliorer le processus de création. Pour Nicolas Salagnac, l’avenir de la gravure se situe dans un équilibre entre la maîtrise technique traditionnelle et une ouverture aux nouvelles technologies.

Propos recueillis par Michael Bechler de NeoStoria en préparation de la table ronde organisée par Rivalis et les Meilleurs Ouvriers de France (MOF).

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